Sabrina Le Guen

Il faut assumer son baile et son identité

Que de chemin parcouru depuis la première fois que Flamenco Culture a croisé la route de Sabrina Le Guen ! Déjà à l'époque la danseuse affichait des qualités indéniables pour le baile. Elle a franchi il y a quelques mois un nouveau cap en montant sa compagnie, et nous parle de son parcours et du spectacle "Enlace Flamenco" qu'elle présentera à la Reine Blanche à Paris les 6 et 7 octobre prochains.

Sabrina, comment s'est faîte ta rencontre avec le flamenco ?

En fait, mon grand-père espagnol était aficionado et il en écoutait très souvent. Il pratiquait également un peu de guitare. Après sa mort, j'ai perdu le lien avec le flamenco et c'est lors d'un long séjour à Séville que j'ai redécouvert un son qui m'était familier et qui m'a tout de suite séduite.

Pourquoi t'es-tu dirigée vers le baile ?

J'ai été subjuguée par la force qui se dégageait de scène lors d'une soirée tablao mais c'est suite à un rêve que tout a vraiment démarré, aussi bizarre que cela puisse sembler. Je rêvais que je dansais le flamenco et cela m'a procuré un tel sentiment de joie et de liberté que je me suis inscrite à mon premier cours dès le lendemain.

Avec qui t'es-tu formée ?

En tant que voyageuse, je me suis formée dans beaucoup d'écoles. J'ai commencé les cours à Séville avec Fernando Romero puis Alicia Marquez puis je suis allée vivre à Berlin où j'ai pris des cours avec une danseuse d'origne Sévillane, Ana Maria Amahi. Ensuite, j'ai vécu à Toulouse où je me suis formée avec Soledad Cuesta. J'aurais également souhaité prendre des cours avec Fanny Fuster mais elle n'était pas encore revenue de Séville. La ville de Toulouse me semble très dynamique: elle offre de nombreuses programmations flamencas de très bon niveau.

J'ai aussi suivi l'enseignement de maestros comme Concha Jareño, Fran Espinosa, Carmen La Talegona, Alfonso Losa, Inmaculada Ortega, Manuel Liñan... et tellement d'autres.

Beaucoup choisissent l'Andalousie pour aller se perfectionner, toi tu as préféré passer un an à Madrid, pourquoi ce choix ?

Je ne connaissais pas Madrid et sa culture alors que j'avais auparavant vécu deux ans à Séville. J'avais besoin de découvrir une autre manière de vivre le flamenco.

Tu as dansé récemment à Madrid à Artebar la Latina, qu'as-tu ressenti ?

Ce fut une expérience très agréable et forte. J'étais euphorique à l'idée de partager la scène avec d'autres artistes aficionados de très bon niveau et venant des quatre coins du monde : Angleterre, Australie ou même Chili.... le flamenco n'a plus de frontières ! Il est regrettable que ce genre de rencontres entre artistes ne se fasse pas plus souvent à Paris, on apprend tellement les uns des autres dans le partage.

Tu as décidé de conserver ton vrai nom pour la scène alors que tu aurais pu comme d'autres prendre un pseudonyme, pour quelle raison ?

Je pense qu'il faut assumer autant son baile que son identité. Ma mère s'appelle Dolores Delgado mais j'ai préféré garder le nom de famille qui m'a été attribué à ma naissance. Le flamenco s'internationalise : ne craignons pas de nous affirmer en tant qu'aficionados nés hors d'Espagne. Le nom de famille d'un artiste ne donne aucune indication sur la qualité de son travail !

Peux-tu nous parler du spectacle "Enlace Flamenco" que tu vas présenter à la Reine Blanche en octobre prochain ?

Il s'agit d'un spectacle de flamenco traditionnel qui réunit de grands artistes de la scène flamenca française et espagnole. Il s'organise comme un tablao. Caridad Vega qui m'accompagne au chant est originaire de Sanlucar de Barrameda. Elle travaille actuellement à Madrid avec les plus grandes compagnies de flamenco (Rafaela Carrasco, Antonio canales...). C'est un véritable honneur pour moi d'être accompagnée dans ce projet par des chanteurs tels que Caridad Vega et Cristo Cortes. La direction musicale a été confiée a Mathias Berchadsky qui a composé spécialement pour le spectacle Enlace Flamenco! Il est accompagné à la guitare par Wilfrid Durand, et par Cédric Diot au cajon.

Que vas-tu danser ?

J'ai commencé à travailler pour ce spectacle lorsque j'étais à Madrid en 2009. A cette époque, je voulais élargir mes connaissances concernant des palos qui ne se pratiquent pas beaucoup. C'est la raison pour laquelle j'ai décidé de commencer le spectacle por Cabales (chorégraphiés par mon maestro Fran Espinosa). Il y a ensuite un taranto, une solea et une alegria. Ce sont des palos très difficiles d'exécution mais il s'agit pour moi d'un défi personnel.

Pour te préparer pour ce spectacle, combien d'heures travailles-tu par jour ?

Difficile à dire... en fait pour préparer ce spectacle je m'entraîne beaucoup et j'y pense constamment... le travail ne s'arrête pas lorsque je sors du studio de danse !

Tu organises également la semaine du spectacle un stage de cante pour le baile avec Caridad Vega...

Oui, il s'agit d'un stage exceptionnel qui ne s'est à ma connaissance jamais fait à Paris. Il s'agit d'un atelier tablao qui s'adresse aux chanteurs et aux danseurs tous niveaux. En fait, nous apprenons beaucoup de pas, de letras... mais nous ne savons pas toujours être à l'écoute des autres artistes une fois sur scène. Caridad Vega propose aux élèves de mieux comprendre quand "rematar", quand marquer et elle enseignera à travers cet atelier tous les codes qui permettent une meilleure communication entre le chant et la danse. Il ne s'agit pas d'en savoir beaucoup mais de bien utiliser ses connaissances même en ayant un niveau débutant. J'ai assisté à l'un de ses ateliers à Madrid et j'en suis ressortie ravie !

Quels sont tes projets après la Reine Blanche ?

Après la Reine Blanche, la Cie Sabrina Le Guen se produit à l'espace Culturel Jean Vilar de Marly Le Roi. J'ai également un projet en cours avec l'excellent guitariste Jean Baptiste Marino.


Flamenco Culture, le 12/09/2012


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